Interview : Pauline Thibault

« En ce qui concerne notre filière, l’Economie Sociale et Familiale, il me semble qu’en France nous ne sommes pas assez sensibilisés aux échanges Nord-Sud
Pauline Thibault, volontaire conseillère en ESF, parle de son séjour pendant six mois au sein de l’Association des Conseillères en Economie Sociale et Familiale du Cameroun.

Acesf-Ca : Pouvez-vous vous présenter ?
Pauline Thibault : Je m’appelle Pauline Thibault. Je suis une Française de 23 ans. J’ai effectué un BTS en économie Sociale et Familiale à Paris (La Plaine Monceau), puis j’ai poursuivi mon cursus de 3ème année de Conseillère en Economie sociale et Familiale (CESF) à l’IRTS Parmentier à Paris. Fraichement diplômée en novembre 2011, j’ai effectué un séjour en Afrique afin d’ouvrir « mon champs de vision » sur le travail social. Durant 6 mois, j’ai donc été volontaire CESF au sein de l’Association des Conseillères en Economie Sociale et Familiale du Cameroun (Acesf-Ca).

Acesf-Ca : Comment avez-vous connu Acesf-Ca ?
Pauline Thibault :Etant donné que j’avais le projet d’effectuer un séjour à l’étranger une fois mes études terminées, c’est à mon entrée en 3ème année de CESF que je me suis renseignée sur les structures sociales existantes en Afrique. Je me suis donc renseignée auprès des intervenants à L’IRTS Parmentier. C’est auprès d’un de mes anciens professeurs de BTS que j’ai obtenu le contact de Wandji Marie-Louise, présidente de l’Acesf-Ca car une élève a effectué son stage de 1ère année de BTS ESF au sein de l’association. Je me suis donc rendue sur le site de l’Acesf-Ca afin d’avoir plus amples informations. Une fois que j’étais bien renseignée par les missions de l’association, et que j’avais envie de découvrir et d’aider l’association, ce professeur m’a mis en contact avec Mme Wandji Marie louise.

Acesf-Ca : Comment avez-vous préparé votre voyage au Cameroun ?
Pauline Thibault
:Après avoir échangé avec Mme Wandji, j’ai cherché à obtenir des informations sur le travail social en Afrique, et plus particulièrement au Cameroun, et plus généralement sur la vie au Cameroun.

Pour cela, j’ai commencé par effectuer des recherches sur internet. J’y ai trouvé beaucoup d’informations, cependant certaines étaient très contradictoires. J’ai donc cherché à rencontrer des personnes qui avaient vécu au Cameroun afin d’avoir des informations complémentaires à celles trouvées sur internet. C’est donc au cours de discussions sur le pays avec mon entourage que j’ai obtenu ces contacts. Ces premiers échanges ont été bénéfiques pour préparer mon séjour.
Enfin, j’ai lu des livres, des articles sur les coutumes, les spécialités de chaque région du Cameroun, etc., mais aussi sur le travail social en Afrique.
Ces recherches m’ont permises de mieux appréhender les réalités du pays et d’éviter certaines surprises, cependant il n’y a pas mieux que d’aller vivre au Cameroun pour se faire sa propre idée car plusieurs rencontres me permettent de vous dire que chacun vit les réalités à sa manière.

Acesf-Ca : Quelles étaient vos attentes avant votre voyage au Cameroun ?
Pauline Thibault
: Mes attentes étaient de natures diverses. Tout d’abord professionnelles, mais également personnelles.

Je me questionnais sur le travail social en Afrique. J’avais donc dans l’idée de me rendre au Cameroun afin d’observer la manière dont les travailleurs sociaux accompagnent la population, et comment font-ils sans réels moyens financiers. Découvrir de nouvelles pratiques, le fonctionnement d’une association (avec les bailleurs de fonds, la façon de financer le fonctionnement de l’association, connaitre les personnes qui y travaillent de façon bénévoles leur motivations) faisaient partie de mes objectifs. Echanger avec des professionnels de culture différente, aborder les différences au sein de la formation ESF entre la France et le Cameroun, connaitre les différentes structures existantes au Cameroun faisait également partie de mes motivations.
D’un point de vu personnel, j’avais envie de découvrir les différences de cultures, les différentes traditions. J’avais pour valeur de ne me mettre aucune barrière, goûter toutes les préparations culinaires qui m’étaient proposées, car c’est pour moi un signe d’ouverture à l’autre.
En ce qui concerne les attentes, j’ai essayé de ne pas me fixer d’objectifs précis afin de vivre mon séjour pleinement et de ne pas partir avec des idées fausses.

Acesf-Ca : Quelles activités avez-vous mené au sein d’Acesf-Ca ?
Pauline Thibault :L’Acesf-Ca entreprend des activités en adéquation avec les objectifs définis préalablement. Depuis 2011, l’Acesf-Ca mène un projet nommé « Accès des femmes pauvres au pouvoir d’achat et à la sécurité alimentaire », en partenariat avec Martat, une association Finlandaise.
Dans ce contexte, j’ai donc mené un certain nombre d’activités :
Contribuer à la finalisation des outils de travail dans le cadre du projet « Accès des femmes pauvres au pouvoir d’achat et à la sécurité alimentaire ». Tout d’abord un travail de réflexion, puis de confection de cartes pour faciliter l’apprentissage des portions alimentaires, d’un dépliant, d’une boite à image.
Former les formateurs dans les deux autres régions, à Bamenda et Maroua. La formation a été améliorée par certains outils qui n’avaient pas pu être finalisés lors de la première formation : boite à image, dépliants, cartes. Cette formation était nécessaire afin d’expliquer à quel moment ceux-ci interviennent, leurs objectifs, ainsi que la manière dont ils ont été conçus.
Contribuer à la rédaction du cahier d’animation (formation en nutrition, formation en entrepreneuriat)
Contribuer à la réflexion du concours mensuel de cuisine en vue de produire un recueil de recettes
Planifier le Congrès 2013 de l’Acesf-Ca
Aider à l’encadrement des stagiaires
Rédiger des rapports sur les différentes activités
Les activités que j’ai menées au sein d’Acesf-Ca étaient très diversifiées. Cela m’a permis de m’ouvrir l’esprit, observer une autre manière d’approcher les choses. Or, je n’aurai peut être pas eu ces opportunités lors de mon premier emploi en France.
Qu’est ce qui vous a le plus plu pendant votre séjour au Cameroun ?
Tout au long de mon volontariat, j’ai travaillé au siège de l’association à Yaoundé avec une ESF Camerounaise. Nous avons échangé, établi des comparaisons tant sur le plan du travail au sein de l’association et de l’ESF en générale, que sur la vie au Cameroun et France. Elle m’a aidé à m’adapter en m’expliquant les expressions et les coutumes locales etc. ces échanges ont été très constructifs.
J’ai également beaucoup apprécié me déplacer dans les différentes régions (Bamenda et Maroua) pour former les formatrices et les accompagner au cours des formations en nutrition. Le fait d’effectuer ces déplacements m’a également permis de découvrir la diversité du Cameroun ; tant au niveau du paysage que de la culture car au cours de ces séjours, nous avons assisté aux formations en nutrition. J’ai donc pu échanger avec les femmes qui se formaient, et ce même si je ne parlais pas la même langue que certaines d’entre elle. Nous trouvions toujours des moyens de nous faire comprendre.
J’ai été en contact avec les bénéficiaires, qui ont eu la gentillesse de m’accueillir chez elle. J’ai ainsi pu vivre leur quotidien, voir à quel point elles travaillent, et se battent pour nourrir leur famille. Ces femmes que nous avons formées lors des formations en nutrition et en entrepreneuriat m’ont donné une grande motivation à travailler. Le travail de recherche que j’ai effectué au sein d’Acesf-Ca a été motivé par la rencontre de ces camerounaises. Le fait d’allier le terrain et le travail de recherche m’a permis d’adapter les outils de la manière la plus adéquate.
J’ai eu la chance d’être hébergé dans une famille camerounaise très ouverte. J’ai ainsi pu échanger sur les sujets qui me venaient à l’esprit, et ainsi mieux comprendre la vie au Cameroun. Cela m’a également permis de gouter la cuisine typiquement Camerounaise à laquelle je me suis laissée tenter, sans me fier à l’aspect (termites, chenilles blanches), et que j’ai beaucoup apprécié.
Il y aurait encore une longue liste à écrire, car j’ai vécu un séjour inoubliable au Cameroun.

Acesf-CA : Qu’est-ce que vous souhaitez voir améliorer dans le partenariat Nord-Sud au sein des organisations de la société civile ?
Pauline Thibault
:Le partenariat répond à différents enjeux en fonction des objectifs des associations et des projets, tel qu’un partenariat basé sur les échanges entre pays, ou la mise en œuvre d’une action de développement ou encore le renforcement des capacités du partenaire sud.

En ce qui concerne notre filière, l’Economie Sociale et Familiale, il me semble qu’en France nous ne sommes pas assez sensibilisées aux échanges Nord-Sud. Rares sont les CESF qui connaissent l’existence des structures d’ESF à l’étranger. Ainsi, nous ne regardons pas se qui se passe en dehors de la France, et échangeons très peu avec les ESF qui travaillent en Afrique par exemple.
L’ESF en règle générale n’a pas une forte identité contrairement à d’autres travailleurs sociaux. Cependant, lorsqu’une ESF est embauchée dans une structure, son travail est apprécié et souvent d’autres postes sont ouverts par la suite.
Un échange plus développé entre les ESF du Nord et du Sud, pourrait être bénéfique pour la profession. Cela permettrait de construire des échanges plus approfondie sur un partage de la vision de l’ESF, un partage d’idées et d’expériences, et ainsi contribuer au renforcement de la reconnaissance de la filière.

Acesf-CA : Quels sont vos projets dans un futur proche ?
Pauline Thibault
: A mon retour en France je vais rechercher un emploi. Le travail au sein de l’Acesf-Ca m’a passionné. Je vais donc rechercher dans un domaine / une structure, où il sera possible d’effectuer un travail de recherche en effectuant les vas et vient sur le terrain afin d’utiliser les compétences que j’ai acquises tout au long de mon séjour au Cameroun. Pour moi, le travail de recherche ne peut pas être dissocié du contact avec la population.

De cette expérience je n’en ressort que du positif. Cependant, il est vrai que le travail peut être contraint par un certain nombre de facteurs. Il est important de prendre en compte les réalités locales. Pour cela la capacité d’adaptation est un réel atout, et l’ouverte à l’autre indispensable, afin d’effectuer un travail en accord avec les besoins locaux.

 

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Séance de travail au siège d’Acesf-CA Pauline Thibault

acesfca